Strasbourg, dans l’est de la France, est le siège du Conseil de l’Europe, qui a été fondé en 1949 au lendemain de la Seconde Guerre mondiale pour promouvoir la démocratie et protéger les droits de l’Homme et l’État de droit. Ses 46 États membres en font une organisation beaucoup plus large que l’Union européenne (entité totalement distincte). La Turquie est membre du Conseil de l’Europe et, comme c’est obligatoire pour tous les membres, elle a signé la Convention européenne des droits de l’Homme.
La Convention européenne des droits de l’Homme est garantie par la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH). Il s’agit d’une institution permanente dont les juges sont nommés par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, qui est composée de parlementaires délégués par les différents États membres.
Les affaires ne peuvent être entendues par la Cour européenne des droits de l’Homme que lorsque les requérants ont épuisé toutes les possibilités de recours juridique dans leur pays d’origine. Les procédures judiciaires peuvent être très longues et, même lorsque la cour déclare un État coupable de violation des droits de l’Homme, l’application des décisions de justice peut être difficile. Toute mesure prise à l’encontre d’un État qui refuse de se conformer doit être approuvée par l’organe de décision du Conseil, le Conseil des ministres. Celui-ci est composé des ministres des affaires étrangères des États membres, ou de leurs représentant·es diplomatiques (député·es).
La Cour européenne des droits de l’Homme a entendu plus d’affaires contre la Turquie que contre tout autre membre du Conseil de l’Europe, y compris des affaires concernant le procès et l’emprisonnement d’Öcalan.
L’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme stipule que : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ». Pour y contribuer, le Conseil a élaboré la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, qui est entrée en vigueur en 1989 et a également été ratifiée par tous les membres du Conseil. Cette convention est soutenue par le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT). Le CPT est composé d’expert·es indépendants élu·es par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe. Il n’est pas une organisation judiciaire mais travaille en coopération avec les autorités nationales. Il bénéficie d’un accès unique aux lieux de détention et peut effectuer des visites ad hoc ainsi que des visites régulières. La publication de ses conclusions nécessite l’accord de l’État inspecté, bien que le CPT ait également la possibilité de faire des déclarations publiques.
Le CPT a effectué plusieurs visites à la prison de l’île d’Imrali où Abdullah Öcalan est détenu, mais la plupart des changements qu’il a demandés n’ont pas été mis en œuvre. Comme personne d’autre n’est autorisé à s’y rendre, leurs visites gagnent en importance. Face à une pression concertée, ils ont rendu visite à Öcalan et aux trois autres prisonniers d’İmralı en septembre 2022, mais aucune nouvelle de ce qu’ils ont trouvé n’a été communiquée.
Le Conseil de l’Europe sert également de forum pour débattre et suivre les questions autour des droits de l’Homme à travers son assemblée de parlementaires des États membres et son congrès de représentant·es des autorités locales et régionales, et à travers leurs comités associés. Les membres peuvent également organiser des événements parallèles pour aborder des questions dans le bâtiment du Conseil. En juin 2022, le groupe de gauche a organisé un événement pour discuter du régime illégal de la prison de l’île d’İmralı, où Öcalan est détenu, et a entendu directement l’un de ses avocats.
Le Conseil a établi une liste utile distinguant ses organisations de celles de l’Union européenne, mais aussi des Nations unies.
Pour ajouter au risque de confusion, l’Union européenne se réunit également à Strasbourg une fois par mois – dans un bâtiment séparé mais adjacent – et les député·es européens qui la soutiennent se rendent également à la vigie. La Turquie n’est pas membre de l’UE mais est reconnue comme un pays candidat. Les relations de la Turquie avec l’UE sont hautement politisées. L’UE a cédé à la pression turque pour inscrire le PKK sur la liste des « organisations terroristes » en 2002, en plein milieu d’un long cessez-le-feu unilatéral du PKK, alors que l’organisation insistait sur la nécessité d’une solution politique. Cette inscription sur la liste des organisations « terroristes » est contestée devant la Cour de justice de l’Union européenne, dont le siège est à Luxembourg et qui est la plus haute autorité en matière de droit communautaire.
(Indépendamment du Brexit, le Royaume-Uni est toujours membre du Conseil de l’Europe et lié par la Convention européenne des droits de l’Homme, et la Russie en était également membre jusqu’à ce qu’elle soit expulsée suite à son invasion de l’Ukraine).